mercredi 15 juin 2016

Strikers 1945 Plus

Strikers 1945 + Plus (Psikyo)
Test de Strikers 1945 Plus: Neo Geo (Psikyo)
Sortie originale: Arcade (1999)
Emulé commercialement sur: iOS, PSP
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En matière de Shmups, je me rends compte que j'ai vraiment des goûts conservateurs. Depuis que j'ai remis le nez dans les 16bit, clairement, les verticaux qui m'ont le plus scotché, ce sont les scorers à l'ancienne - les bullet-dodgers, les brutaux, les sans chichis.
Sur Megadrive ou sur PC Engine, pour ça, il y a de quoi faire. Par contre, j'étais assez frustré de ne pas trouver de shoots qui m'attire sur Neo Geo; ceux qui sont souvent considérés comme les plus typiques la console (Viewpoint, Pulstar, Blazing Star), je n'ai jamais accroché. Ca viendra peut-être... En attendant, j'avais plutôt commencé à renifler du côté des premiers shoots de la console: Ghost Pilots, Alpha Mission II et Last Resort.
Et puis s'est présentée l'occasion de faire l'acquisition de ce Strikers 1945 Plus - soit tout à fait l'inverse de ce que j'avais en tête puisqu'il s'agit du tout dernier shoot them up sur Neo Geo, sorti à la fin de l'année 1999! Si vous ne le connaissez pas, c'est au moins une curiosité à laquelle il vous faut jeter un oeil - à vrai dire, c'est carrément un OVNI, et à plus d'un titre.

Concevoir des logos, c'est un métier. Par exemple, ici, on jurerait que c'est le 1945 qui est mis en valeur. Dingue.

Le shoot à la croisée de 3 générations

Il s'agit un remake, adapté au format 4:3 pour le support MVS, d'un shoot vertical développé quelques années plus tôt par Psikyo, alors un des new kids on the block du genre au début de l'ère 32bits, et un des artisans de l'essor du Manic Shooter. Il n'est jamais sorti officiellement au format AES ou CD.
Techniquement, il est vraiment déconcertant. Graphismes et animations sont super léchés, usant visiblement des techniques de pre-rendering et de digitalisation auxquelles on avait massivement recours au milieu de la décennie; d'un autre côté, les décors sont très ternes et statiques, sans même une scrolling latéral - une sobriété qui contraste fortement avec l'agitation colorée qui remplit bien vite l'écran. C'est évidemment voulu, et donne une parfaite lisibilité à une action très chargée en boulettes; il n'empêche que ce ne sera pas du goût de tout le monde.

P pour Power up, B pour Bomb; on retient assez bien.

L'autre paradoxe, il est ludique. Strikers 1945+ vient ajouter ce copieux arrosage de l'écran en tirs roses (lents) et bleus (rapides) caractéristiques des bullet hells aux mécaniques classiques héritées des titres fondateurs du genre. N'y cherchez pas de système de scoring à combos multiplicateurs ou autres extravagances de gameplay: les points se font à l'ancienne, en dégommant de l'avion avec ses tirs qui font pan-pan et en ramassant des lingots d'or; quant aux bonus, il n'y a que des power up (ou down) et des bombes.


Vieux coucous et pink bullets

Le jeu se concentre donc sur les fondamentaux du scoring et de l'évite-boulette sous toutes ses facettes: anticipation, fuite, slalom. Et de ce point de vue-là, franchement, il a tout du pinacle inattendu d'un genre qu'on pensait éteint; celui des "jeux d'avions", les vieux roudoudous de la série 194X de Capcom, ou de leurs clones animaliers made in Toaplan (les Tiger, Cobra, Hawk, et Shark de tous poils). On y retrouve d'ailleurs la même fantaisie discrète au niveau des ennemis, puisqu'en plus des on ne peut plus conventionnels tanks, avions et bateaux, on affronte des bosses mecha-transformers assez grotesques de haute technologie et de grobillisme.
Strikers fait d'ailleurs la part belle (trop, peut-être?) aux affrontements contre ces derniers, qui surviennent au terme de niveau assez courts, ce qui contribue à le démarquer, dans le rythme et les façons de faire, de ses augustes aînés. Ne vous attendez donc pas à retrouver les mêmes sensations que sur les classiques du shoot typés deuxième guerre mondiale. De son hérédité de manic shooter, Strikers tient également des ennemis dont le nombre, la résistance, et surtout les schémas d'attaque le distinguent tout à fait des productions du tournant des années 90.
Strikers évite au passage certains de leurs travers, comme le syndrome du "one-life-sinon-rien" propre aux jeux qui à chaque crash font revenir à un checkpoint armé d'un vieux tir miteux. Les Power up sont plafonnés à +3, et sont fournis assez régulièrement, y compris après la perte d'une vie. N'allez pas croire pour autant que vous serez à la balade! Le jeu donnera du fil à retordre même aux pros du manche à balai, mais le challenge est bien étudié, progressif, et jamais injuste, ce qui rend certaines réussites très gratifiantes.



Les bosses ont généralement 3 formes successives à détruire, la dernière étant mechoïde et souvent riche en boules bleues.

Parmi les références confinant au plagiat, on retrouve l'immortel Lockheed P38 Lightning de 1942 (le jeu de Capcom) dans la liste d'appareils sélectionnables. En effet, plutôt que de proposer un arsenal variable qui ajoute une couche supplémentaire de complexité au gameplay, les concepteurs ont là encore ménagé la chèvre et le chou: ils ont fait le choix d'un armement fixe améliorable uniquement en puissance, mais qui est très différent entre les 7 avions sélectionnables.


Hey, il est là aussi, lui!


Chacun de ces coucous se caractérise selon les variables suivantes:
- envergure: la taille du zinc - dont l'importance est à relativiser car la hitbox n'y correspond pas!
- vitesse: sa rapidité de mouvement, bien sûr. Prenez le plus lent, et vous gagnerez en précision de déplacement mais devrez faire des efforts d'anticipation supplémentaires; prenez le plus rapide et la navigation entre les boulettes pourra devenir plus délicate.
- tir principal (le pan-pan droit devant): plus ou moins puissant et plus ou moins étendu en largeur.
- tir secondaire (missiles et assimilés): varie notamment en puissance, portée et guidage.
- tir spécial: la botte secrète du navion, en quelque sorte, aux propriétés très variables!
- bombe: là encore, des propriétés très variables autour de deux fonctions principales habituelles: détruire les ennemis et se fournir un écran pare-balles.

La "bombe" tient plutôt du soutien aérien, et varie beaucoup d'un avion à l'autre. Ici, le groooos navion qui épaule le Zéro.

Ces différences entre les avions sont un vrai atout du jeu; même si elles reposent sur des variantes d'interactions très simples, elles suffisent à rendre le maniement de chaque appareil distinct et intéressant à jouer. Les petits malins prendront le Flying Pancake (le plus efficace au premier abord); les méthodiques le Spitfire ou le Focke Wulf ; les têtes brulées le P38 ou le Zéro; les virtuoses du manche le Fiat. Quel que soit l'appareil en tout cas, les commandes sont un régal de précision, et ce peu importe l'encombrement de l'écran.

Le mythique Lockheed P38 lightning et son grappin foudroyant. Plutôt un choix d'homme.

Super Ace ?

Alors, est-ce un sans faute pour autant - non. 
Graphiquement comme ludiquement, Strikers 1945+ a un côté coincé entre deux générations de shoots, et fonctionnel sans un poil qui dépasse qui laissera pas mal de monde de marbre. Même moi qui suis complètement le public pour ce type de shoot, j'aurais bien aimé un petit grain de folie supplémentaire dans le rythme ou la mise en scène.
Les défauts de ses qualités, sans doute - même si c'était visiblement un peu l'intention, on ne peut pas tout avoir. Et là, ce qu'on a, c'est à plus d'un titre une sorte d'aboutissement tardif de la branche la plus classique du genre, et une bénédiction inattendue sur Neo Geo pour les amateurs de bullet-dodgers purs et durs.


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En Bref

VISUEL
Un aspect du jeu qui ne fera pas l'unanimité. Tout est objectivement très réussi, richement animé et parfaitement fonctionnel - en contrepartie, on ne peut pas dire que ce soit très fun à regarder, ni ait le même charme que de l'authentique pixel-art. 

AUDIO
Là encore, la bande son est d'une qualité irréprochable. Mais ces marches militaires, même lorsqu'elles s'animent dans les combats de bosses n'ont pas l'impact de certains thèmes légendaires du genre.

GAMEPLAY
Difficile encore de prendre en défaut Strikers 1945+ sur ce point; pour les fans de ce sous-genre, c'est un "jeu d'avion" de rêve, qui fait le choix de se concentrer exclusivement sur les fondamentaux des classiques comme des manic shooters: anticiper, éviter, lire les trajectoires, slalomer entre les balles et faire des points se montre particulièrement gratifiant. Niveau durée de vie, on n'est pas floué non plus, avec 8 niveaux de difficulté croissante, un 2e loop brutal, 7 appareils à maîtriser, et une formule parfaitement adaptée au scoring.

AU FINAL 
Strikers 1945 Plus, c'est un jeu intrinsèquement paradoxal, dans son essence de classique/manic sorti sur 16bit à la toute fin des 90s. Pour les amateurs d'évite-boulettes, c'est quasiment le jeu zéro-défaut - et pourtant! Il n'est pas dit que ceux qui cherchent un gameplay original, ou au contraire à retrouver les sensations des vieux classiques y trouvent leur compte. 
Pour ma part, je trouve que c'est un jeu tout à fait excellent - mais qui ne m'a pas charmé.

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