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mardi 23 juin 2020

La série The King of Fighters sur Neo Geo

Il y a eu une époque où on sortait des jeux de baston comme on sort aujourd’hui des Fifa : tous les ans, paf, il y avait un nouveau millésime. On le faisait tourner, on l’observait, on le humait, on le faisait rouler en bouche. On lui trouvait parfois un bon nez de fruits rouges, parfois un arrière-goût de banane. 
Cette époque bénie des amateurs de baston, c’est évidemment les années 90, et la série fleuve à laquelle on pense forcément, c’est King of Fighters. Du ‘94 au 2003, c’est bien 10 épisodes qui ont été publiés sur l’inépuisable Neo Geo. Des sorties annuelles qui ont d’abord été des évidences, portées par l’immense succès du versus fighting en salles arcade, avant de devenir un enjeu de fan service, de prestige, et de survie du fleuron d’une marque en déroute: l’estampille SNK.


Une décennie de baston, une décennie d'arcade, une décennie de Neo, une décennie de SNK...

Moi qui ai plutôt l’habitude de causer ici de titres plus ou moins obscurs du genre, je vais cette fois présenter ce qu’on ne présente plus. La littérature sur King of Fighters, ce n’est pas ce qui manque et je ne vais rien réinventer. Mais d’une part c’est une série que je continue à (re)découvrir bien qu’elle ne m’ait jamais longtemps quitté depuis 1994; et d’autre part elle ne cesse d’alimenter régulièrement les discussions, que ce soit entre fans invétérés (chacun ayant son ou ses épisodes chouchous pour des raisons très diverses) ou amateurs de rétro ne connaissant que partiellement la série. Qu’on s’y (re)plonge en démat’ ou en physique sur l’une des nombreuses plates-formes anciennes ou récentes, dans une démarche allant de la collection AES au strict gaming sur un Neo Geo Stick Pro, il n’est pas forcément facile de savoir par quel bout prendre une série aussi longue et généreuse en changements.
Aussi j’espère que ce dossier fournira quelques repères utiles, ou, à défaut, que chacun y trouvera matière à se reconnaître, un petit quelque chose qui piquera son intérêt, sa curiosité, sa nostalgie et viendra compléter ses lectures. 

Japon, Corée, Mexique, Brésil, Chine, USA... La coupe du monde de la baston réunit les plus grandes nations de l'arcade.

Parce que King of Fighters, quel que soit l’épisode par lequel on a mis le doigt dedans, c’est une époque, des souvenirs, et une floppée de personnages récurrents qu’on est toujours content de retrouver.

Ce dossier, je l'ai écrit, réécrit, et tourné dans tous les sens avant de finir par l'organiser de façon très classique, en commençant par une chronologie des deux arcs scénaristiques majeurs de la série. Non pas que je trouve ces histoires de vieux démons et de terroristes du clonage intéressantes (je les trouve complètement débiles), mais elles correspondent sous bien d'autres aspects à des périodes assez distinctes dans l'évolution de la série. Le billet suivant est une comparatif, avec un regard rétro de tous les épisodes. Et pour finir, je tenterai de répondre à l'épineuse question que se posent peut-être certains: le ou lesquels choisir?


De '94 à '98: la période Orochi
De '99 à '03: la période NESTS (& le début de Ash)
Le(s) épisode(s) (in)dispensable(s)
KoF'98 Vs The World

Bonus: Tournoi KoF'94 sur Fightcade


The King of Fighters: de '94 à '98, la période Orochi

King of Fighters '94 et '95: Rugal


A sa sortie, The King of Fighters '94 se voulait le jeu de baston ultime, l’apogée d’une escalade Capcom / SNK - la synthèse, l’aboutissement, l’insurpassable, la pêche dans la gueule qui met KO. 
Avec les années, la technique de ce premier épisode a perdu de sa superbe au regard des suivants, mais il y a des choses qui pour moi n’ont pas vieilli. Le style graphique a un trait et une mise en couleurs qui étaient alors inédits et qui sont restés caractéristiques. Les décors, souvent très animés, fourmillent de détails et de petites scènes et références rigolotes. Ils sont introduits par une courte séquence et servis par une musique complètement en phase avec leurs thèmes et les personnages qui y sont associés. D’ailleurs, la BO de KoF ‘94 est l’une de mes toutes préférées sur Neo Geo. Une qualité d’échantillonnage limpide, un mélange de chiptunes entraînants, de pop, et de grosses guitares avec une pointe d’électro ; des rythmes et des sonorités qui collent parfaitement à ce qui se passe à l’écran,  quelques mélodies mémorables – le son, et en particulier la musique, est l'un des gros points forts du jeu.



Le gameplay, largement hérité de Fatal Fury Special, ne prenait quant à lui pas beaucoup de risques, afin de mieux installer ce qui était alors la grosse nouveauté de ce titre : le jeu en équipe de trois. Mais à la limite, ce n’était pas ce trait-là, ni même le nombre (dingue, à l'époque) de 24 personnages qui en ont fait d’emblée un jeu culte: c’est de quels personnages il s’agissait.

Quand on savait jouer à Fatal Fury 2 ou Special, on n'était pas trop dépaysé.

King of Fighters '94, c'était un "dream match" (le terme était déjà utilisé), présenté comme une coupe du monde de la baston, qui ne consistait pas seulement en un crossover entre Art Of Fighting et Fatal Fury, mais qui célébrait aussi d’anciennes franchises de l’éditeur (Ikari Warriors, Psycho Soldier), en faisant de leurs héros des personnages de ce jeu de combat hors du commun. A ceux-là se ont été ajoutés de nouveaux designs plus ou moins inspirés (on y trouve quand même un Freddy Krueger miniature et un Jean-Pierre Polnareff) ou populaires (seule la Team USA n'a pas beaucoup séduit) pour compléter un cast qui sera le noyau dur de celui de chacun des 9 épisodes qui suivront. Il est complété par un boss final qui restera mon préféré de toutes les franchises SNK : Rugal Bernstein, une sorte de culturiste nazi associant la classe et la méchanceté mégalomane de Geese Howard à la brutalité moustachue de Wolfgang Krauser - et leurs coups spéciaux, aussi.

Malgré des années de surenchère dans la grobillerie, aucun boss n'a jamais surpassé ce bon vieux Rugal.

Pas de "coup d'essai" avec ce premier épisode, donc: dès le début, King of Fighters a donné aux fans de SNK le "plus" et le "meilleur". Alors évidemment, à y réfléchir un petit peu, réitérer ce concept de "best of du tip-top" une fois par an pendant 10 années consécutives, il y avait comme une difficulté rien que dans l’idée. Et pourtant, SNK s’y est appliqué – du moins les premiers temps.


L’épisode ’95 s’est inscrit directement dans le prolongement du succès du ‘94, en reprenant tout ce qui avait plu aux joueurs et en affinant ce qui pouvait l’être. Grosso-modo, le gameplay est toujours le même à quelques ajustements près, les plus sensibles étant que la jauge de vie se vide en 2 claques/ 3 glaviots, et bien sûr que le Team Edit permet désormais de composer n’importe quelle association de 3 personnages, ce qui sera la norme de tous les épisodes suivants.

"Retro", "old-school", "roots", ou juste "vieux" - n'empêche qu'il y a du joli à voir dans les deux premiers épisodes.

Les personnages, justement, gagnent encore en détails et en caractère, avec un casting consolidé. La mal aimée Team USA cède sa place à un nouveau trio: la mythique Rival Team, qui introduit l’incontournable Iori Yagami, entouré de deux gloires des séries sources (Billy Kane dans son costume de Fatal Fury 1, et Eiji le cauchemardesque ninja d’Art of Fighting 2).

La Rival Team: du neuf, du récent, du vieux, et que du badass - une formule gagnante!

Même si je ne trouve pas que ce deuxième volet de la saga rende le précédent obsolète, il est évident qu’avec un gameplay affiné, un casting écrémé, et une réalisation toujours à la hauteur, KoF’95 visait le degré supérieur de la réussite, le « presque pareil mais en mieux » qui était la norme des séries de baston à l’époque. Et effectivement, un peu comme son Rugal, revenu dopé aux stéroïdes et à la magie noire, KoF est revenu renforcé en ’95.


King of Fighters '96 et '97: renouveau et conclusion... Ou pas.


L’épisode ’96 est un épisode de transition, même si à première vue il présente plus de bouleversements que de continuité. 
La première évolution qui saute aux yeux, elle est graphique. Pour survivre en arcade face aux nouveaux hardwares, les séries Neo Geo avaient dû faire peau neuve avec les moyens qui étaient les leurs: des roms de plus en plus grosses et farcies de beaux sprites. C’était déjà chose faite avec les 3e volets de Samurai Spirits, Art of Fighting et Fatal Fury; c’est avec ce cru ’96 qu’est venu le tour de KoF. Et les moyens consacrés par SNK ont été conséquents! La majeure partie du roster original a été retouchée, a bénéficié de frames d’animations supplémentaires, voire a été redessinée de A à Z. Ces sprites de ’96 ont fixé le standard pour le reste de la série et beaucoup serviront de base aux actualisations qui suivront (les graphistes redessinant souvent les personnages sur leurs frames d’animation, ou se servant d’elles pour en introduire de nouvelles). 
Le gameplay a subi lui aussi de nombreux ajustements plus ou moins profonds, avec surtout un nouveau rythme, qui restera plus ou moins celui du reste de la série sur Neo Geo: course, roulade, et bonds d’ampleur, hauteur et vitesse différentes ont bousculé les façons de faire, héritées de Fatal Fury Special, des épisodes précédents. Les Desperation Moves se sont simplifiés et uniformisés, et certaines fireballs ont perdu leur portée pour favoriser le contact… Certains vétérans ont pesté – la plupart se sont adaptés, mais déjà quelques-uns ont refusé de s’y faire.

"Reppppuu Ken!"  - mais pas trop loin!

Beaucoup de changements sont survenus en '96, donc; cependant, l’esprit, lui, est resté le même: procurer une orgie de best of du top cool aux fans. Et là, franchement il y a eu de l’idée. Rugal Bernstein étant out, SNK a ressorti dans ce 3e volet ses pères spirituels pour ajouter une équipe supplémentaires aux 8 existantes : un trio infernal composé de Wolfgang Krauser et Geese Howard, avec Mr Big en guise de 3e larron.

Les mamans ont dû faire beaucoup de lessives de sous-vêtements en 1996.

Une Boss Team complètement culte, qu’on ne retrouvera plus sur Neo Geo, et qui est d’autant plus mise sur le devant de la scène que chacun de ses membres dispose de sa propre musique, héritée de son jeu d’origine. 

"Koko Desu Ka!" - vivement une bonne balayette!

Avec son scénario de tournoi de baston qui tourne en eau de boudin démoniaque mis en valeur comme jamais, King of Fighters ’97 était censé clore en grande pompe l’arc scénaristique (supposément) ouvert en 1994, cette fameuse saga Orochi… Mais aussi et surtout, de l'aveu des développeurs, tourner une page qui devait être la dernière sur Neo Geo, SNK prévoyant alors de se tourner à fond vers l’exploitation de son système 3D, l’Hyper Neo Geo 64.

Comme dans '98, il est possible de jouer avec course et roulades de '96, ou bond et esquive de '94/'95.

Avec cet épisode ’97, on peut considérer que le système de jeu est arrivé à pleine maturité, puisqu'il intègre le rythme et l'essentiel des mécaniques qui caractériseront le reste de la série: un système de jauge de Power réparti sur plusieurs niveaux, des combattants qui gagnent de nouveaux spéciaux, et surtout de nouveaux « Super » ou « Desperation Moves » sur plusieurs degrés d’intensité, ainsi qu'un mode Max (où le personnage gagne temporairement en puissance) déclenchable à la demande. 

Les débuts du... "GALACTICA PHANTOM!!!", entre autres joyeusetés.


King of Fighters '98: le meilleur du meilleur

Les choses n’ayant pas tourné comme SNK l’espérait, plutôt que d'engager la série sur une nouvelle voie, l’éditeur a sans doute choisi de temporiser en sortant cet épisode ’98, "best of" de 4 épisodes déjà conçus comme des best of à la base. La boucle était bouclée, et elle avait refait un tour complet - mais pour le coup, on ne s'en plaindra pas. Car avec ses 12 équipes faisant référence à chacun des 4 premiers épisodes, un gameplay éprouvé repris de l’opus précédent, une réalisation exceptionnelle, une présentation soignée dans tous les détails, et une BO qui donne une nouvelle jeunesse à des morceaux devenus des classiques, King of Fighters '98 est une célébration de sa propre série - largement considéré, aujourd'hui encore, et 5 épisodes Neo Geo après, comme le meilleur des dix jeux sur le support.

"Genociiiide catta!" - le Rugal nouveau est arrivé, et il est jouable sans bidouille.

Si on met de côté les affaires de goûts, et qu'on s'en tient à des considérations un peu objectives, l'avis  général est que de '94 à '98, la série n'a cessé de progresser. On est passé de 196 à 683 Mb, et même si je n'irais pas jusqu'à dire que l'avancée technique a été aussi spectaculaire en 5 ans que ces chiffres le laisseraient supposer, on atteint avec King of Fighters '98 un niveau de qualité graphique et sonore qui surpasse tous les précédents, un gameplay à la fois plus riche et moins faillible, ainsi qu'une offre de personnages record. Un bilan élogieux et consensuel qui est tout sauf une évidence dès qu'on parle de séries, à plus forte raison après autant d'épisodes.

Saisyu Kusanagi, autre boss mémorable de '95, est là lui aussi.

Surtout, cette progression s'est faite en se tenant au concept original de crossover, en invitant chaque année de nouvelles guest-stars de la baston SNK à venir se joindre au tournoi.

Et c'est sur cette idée précise que s'est produite, à mes yeux en tout cas, une rupture à partir de l'épisode suivant; plus en tout cas que sur des questions de gameplay, de réalisation, d'esthétique - ou de scénario bidon!



Je développe pourquoi dans le billet suivant!

The King of Fighters: de '99 à '03, la période NESTS (& Ash)

King of Fighters '98 avait tout d'un feu d'artifice final. C’est simple, il était tellement abouti qu’à l’époque on n’envisageait pas trop comment mieux faire… Surtout que le système avait déjà fait plus que son temps, et que l’éditeur semblait au bord du précipice. 




Parce que bon, quitte à rappeler des évidences, en 1999, sortir des jeux de baston en 2D en 320x224, ça commençait à devenir chaud. Sur certains marchés, c’était même l’impasse. A la maison, on jouait sur 128bit (et à la Neo Geo sur son PC). En salle d’arcade, ce n’était gère plus simple; déjà parce que le secteur marquait un fort déclin dans pas mal de pays, mais aussi parce que le MVS était désormais complètement à la ramasse technologiquement parlant. On parle beaucoup de la concurrence de la 3D, mais sur la 2D aussi, le hardware SNK était largué face aux CPS III, Naomi et même PGM. Pire que cela, le MVS avait épuisé toute capacité d’évolution, puisque la capacité des cartouches avait atteint son plafond (jusqu’à 2004, elle n’ira pas beaucoup plus haut que les 683mb de KoF ’98).

L'évolution de la taille des roms n'impactera pas tant la série que le changement d'éditeur.

The King of Fighters '99 et 2000: les derniers SNK

Alors, pour tenter de continuer à faire progresser la série graphiquement parlant, le choix des développeurs de King of Fighters ’99 (et dans une certaine mesure de 2000) a été de privilégier la qualité à la quantité. En se concentrant sur un nombre de personnages moindre et quelques décors seulement, ils ont déployé des trésors de savoir-faire pour obtenir un visuel aussi impressionnant que des procédés 2D classiques le permettaient sur le hardware obsolète de la Neo Geo. C’est en tout cas le trait le plus saillant de cet épisode, souvent cité pour la beauté de ses décors ou le rendu très efficace des dessins de Shinkiro… On peut aussi vanter le travail accompli sur les personnages, dont beaucoup ont reçu un nouveau coup de frais : recolorés, partiellement voire complètement redessinés, bénéficiant d’une animation encore améliorée, ils sont plus beaux que jamais. Et rejoints par de nouveaux venus, eux aussi magnifiquement travaillés.

K' star de '99? Bof: il y a quand même 3 versions de Kyo à l'écran de sélection!

C’est justement sur ce point que se situe un tournant majeur de la série (évoqué en conclusion de la page précédente), qui s’appuyait depuis ses débuts sur un concept de baston « all-stars ». Les deux séries-mères qui alimentaient KoF ne remuaient plus un orteil: Art of Fighting s’est éteint avec le 3e épisode en 1996 ; quant aux Real Bout, ils n’en finissaient plus de rappeler les personnages des anciens de Fatal Fury à la rescousse...  Les développeurs ont donc fait le choix d’introduire de nouvelles têtes: pas moins de 15 au total entre KoF ’99, 2000 et 2001. Pour un seul transfert de Real Bout 2 (Li Xiangfei), et surtout zéro de Garou: Mark of the Wolves (il faudra attendre 2003 pour cela). Pourquoi ce changement de direction?


Comment pouvait-on encore faire des KoF quand il n'y avait plus de stars à inviter?

Je suppose que ça devait en partie être pour répondre à des critères de mode et de marchés visés. La Corée,  la Chine et l’Amérique du sud demeuraient les bastions les plus solides du MVS en raison de son faible coût en comparaison avec les systèmes plus récents; d’autre part, les années Arnold étaient finies, et elles avaient déjà bien servi le casting. Place a donc été faite aux femmes, aux enfants, aux ambigus, et aux silhouettes filiformes populaires en Asie. A commencer par celle de K’, sorte de star maudite de la J-Pop, propulsé en tête d’affiche à la place de Kyo, dont la Hero/Japan/Esaka Team a été assez symptomatiquement démantelée! Des concepts d’un goût généralement considéré comme discutable en occident, et dont j’aurais du mal à dire si le point culminant est la NESTS Team de KoF 2001 ou la Ash Team de KoF 2003...

Je vous le fais à "inégaux et polarisants", qu'est-ce que vous en dites?

On peut aussi supposer qu’avec un système de jeu qui restait foncièrement pas très différent depuis plusieurs années, ces nouveaux personnages seraient le véhicule d'expériences de jeu différentes: Vanessa la boxeuse agile, Ramon le Bruce Lee de la Lucha Libre, ou Hinako l’écolière sumotori constituaient autant d’offres plus ou moins extravagantes pour qui était rompu au maniement du shotoclone.

Whip, un personnage qui est resté, et qu'on a pris l'habitude d'insulter.

Toujours dans cette optique de rafraîchir un peu le gameplay, il y a un autre changement que '99 a initié: le Striker, un 4e personnage sélectionné pour intervenir de façon limitée et ponctuelle pendant le combat. Une petite mécanique de jeu (une fois de plus piquée à Capcom) que SNK a greffé au gameplay pour le renouveler un peu, sans pour autant trop s’éloigner de ce qui faisait l’identité de la série. Elle a été déclinée de façon différente sur les épisodes 99, 2000 et 2001, et a permis de créer un peu de variété à bon compte, notamment parce qu’elle impactait la composition des équipes. Mais une fois le tour de la question fait (et la mode passée), cette variable fut abandonnée -définitivement- avec King of Fighters 2002. 


Les Counter et Armor modes de '99 et 2000 ne seront pas reconduits au-delà. Pas "mauvais", juste "sans plus".

On a coutume de présenter King of Fighters 2000 comme le dernier épisode signé du SNK «historique». Le fait est que la qualité de la réalisation est toujours au rendez-vous (même si elle est à mon avis un tout petit cran en dessous de celle de '99), et que le jeu délivre du fan service à n’en plus finir par l’intermédiaire des Strikers alternatifs de chaque personnage.

Des incursions des personnages qui ont un bon goût de nawak.

Je ne sais pas s’il faut le relier au départ de Takashi Nishiyama (qui encadrait KoF depuis sa création) ou à un énième sentiment que cette fois-ci, c'était vraiment la fin, mais je trouve que cet épisode se démarque un peu plus encore des précédents : bande son essentiellement électro, références qui partent un peu dans tous les sens (de Robo Army à Samurai Spirits), décors photoréalistes parfois à la limite de l'austérité, strikers débridés, et pas moins de six personnages totalement inédits… KoF 2000 a quelque chose d’à la fois luxueux, généreux, et décadent - pour tout dire, un petit goût de fête du slip.


Ce qui, après tout, n’est pas inadapté pour un épisode de fin de siècle/millénaire/éditeur/monde. Oui, il y a définitivement quelque chose de "2000" dans ce KoF là, et c'est ce qui fait son charme à mes yeux.
Si on se replonge un peu dans l’époque, les titres suivants sonnaient, eux, carrément comme des projets de science-fiction…

The King of Fighters '01 et '02: la parenthèse Playmore/Eolith

En plein chaos du démantèlement de SNK, King of Fighters 2001 a été développé à l’économie par une petite équipe assemblée autour d’une poignée d’anciens de la boîte, alors que son ancien patron était encore en train d’en rapiécer les licences au sein de son nouveau label, Playmore.  Faute de pouvoir s’appuyer sur les talents et les moyens de feu SNK, KoF 2001 mise largement sur ses sprites hérités des épisodes précédents, son roster record de 40 personnages et quelques nouveaux remaniements de gameplay pour tenir sa place et assurer la continuité de la franchise.

Le retour de Heidern sur le tristement célèbre circuit de Sao Polo.

Produite par le Coréen Eolith pour les derniers marchés actifs de l'arcade, la version Neo Geo est connue pour ses décors conçus en 3D (tels qu'on les retrouve sur PS2), puis mis à plat - façon Computer-Generated Imagery.

KoF 2001, sous-titré "Invocation de perso de manga et traits de stabylo sur dégradés de gris"


Sauf qu'aucun effet de profondeur n'en est tiré, et que résolution comme palette de couleurs suivent comme elle peuvent, c'est à dire pas toujours très proprement. Du coup, après 3 épisodes qui avaient atteint des sommets en termes de réalisation, la descente file un peu la gerbe: le rendu de ces décors est souvent peu flatteur voire assez miteux, et les artworks, au trait déjà moche au départ, ne sont guère valorisés par leur passage au pixel.

Zero (bis) un boss dont la pète-couillerie n'est surpassée... que par le suivant, Igniz!


Le jeu est en plus agrémenté d'une bande-son techno dont on peut au moins dire qu’elle tranche plus profondément encore que la précédente avec la tradition de la série… Bref, ce KoF 2001 est ce qu’on pourrait appeler un épisode de survie. Et le suivant est du même tonneau.

Car après avoir rallongé la sauce NESTS tant qu’ils pouvaient, c’est avec des moyens qu’on devine toujours limités que le tandem Playmore/Eolith a rejoué la carte du Dream Match (ie, un best of du best of, comme KoF '98) sur King of Fighters 2002. Cet épisode capitalise là encore sur un casting opulent de 40 personnages, mais oppose cette fois la crème des nouveaux personnage de la période NESTS à des équipes qui n’avaient pas passé le cap de 1998 – dont en premier lieu la Team Orochi et la Special Team, très populaires en Asie.

Un affrontement enfin possible. En gris sur gris...

Le jeu ne produit donc toujours aucun nouveau sprite (le boss lui-même étant le retour de la vengeance de Rugal), mais il améliore un peu l’habillage que proposait l’épisode précédent. Les décors, réalisés comme ceux du 2001, n'ont toujours pas un rendu follichon, mais ils multiplient (limite de façon abusive!) les petites références aux personnages des séries SNK. Dans le même ordre d’idée, les musiques récupèrent des sonorités plus familières, et incluent même, de façon assez inespérée, de nombreux classiques... Mais malheureusement, ils ont été réarrangés avec des échantillons peu nombreux, et d’une qualité parfois plus que limite.




En somme, les intentions sont bien présentes mais bridées par l’aspect technique, qui reste décevant: là encore, KoF'02 sur Neo Geo ressemble assez tristement à une version PS2 du pauvre, ce qui, dans l'idée, a quand même quelque chose d'enrageant pour tous les fans du support! Eolith le destinant là encore aux arcades compétitives d’Asie et d’Amérique du Sud, le jeu est également connu pour avoir ouvert des possibilités de combos plus complexes qu’aucun autre auparavant par le biais de sa nouvelle déclinaison du Max mode.



Après cet épisode, il était temps qu'une nouvelle page se tourne pour la série; non seulement le cycle NESTS était on ne peut plus achevé, mais en renaissant de ses cendres sous l’étiquette SNK-Playmore, l'éditeur d'Osaka se devait de faire son come-back avec des moyens et des ambitions renouvelés à l'occasion de la prochaine itération de sa série phare. 

The King of Fighters 2003: autant SNK que Playmore?

Dans la foulée du tant rêvé SVC Chaos, King of Fighters 2003 a bel et bien initié cette relance: c'est la plus grosse rupture depuis '99. Nouveau moteur de jeu, nouvel environnement graphique, nouvelle gestion de l'équipe et du match, nouveaux personnages bien sûr... C'est également un retour aux sources, avec une réinvocation d'Orochi, une moitié de personnages issus du casting fondateur, un seul rescapé de l'ère 2000-2001, et (j'ai envie de dire "surtout") la résurgence du principe du guest-starring, puisque Gato et Tizoc de Garou: Mark of the Wolves intègrent le cast.

Le casting et le scénario de la nouvelle saga... Désaveu des années 2000?

On peut faire le même constat côté réalisation, avec des graphismes rafraîchis, globalement très réussis (des décors low-res ayant cette fois été dessinés spécifiquement) et des musiques qui retrouvent des sonorités qu’on n’avait plus entendues depuis le siècle d’avant, aux mains de talents historiques de SNK (Papaya, Yamapi, et Tate Norio). On peut reprocher certains défauts à cet épisode, mais pas de faire "cheap"!

Tizoc, un bel ajout de MotW... Et Ash, le nouveau perso central de la saga, du genre qu'on aime détester.

En tant que dernier opus sur Neo Geo, KoF 2003 a probablement été une conclusion assez imparfaite; au-delà de quelques défauts techniques, le jeu rompt tout simplement avec trop de conventions de la série... En revanche, en tant que début pour SNK/Playmore et d'une nouvelle ère pour la série, il avait au moins le grand mérite d'afficher une volonté et des moyens encourageants.



Alors, si on fait le bilan de cette deuxième moitié de décennie de King of Fighters sur Neo Geo, je crois qu'on peut dire que ses évolutions ont été au moins autant dictées par les aléas du sort de son éditeur que par des choix de développement. Si de '94 à '98, on avait le sentiment que chaque nouvel épisode était, d'une façon ou d'une autre, une avancée, le parcours de '99 à 2003 a été beaucoup plus chaotique, chacun des épisodes apportant moins des progrès que des différences, très diversement appréciées par les fans de la première heure, aujourd'hui encore.

C'est de ce regard actuel sur l'intégralité de la série que je voudrais parler dans le prochain billet. Et tenter de répondre à cette épineuse question: avec un accès plus ou moins égal aux dix épisodes, lesquels vaut-il mieux privilégier?

The King of Fighters: le / les épisodes (in)dispensable(s) sur Neo Geo

Dix, ça fait quand même beaucoup

Pendant longtemps, je l'avoue, j'ai snobé tous ceux qui entassaient les KoF sur leur étagère. Parce qu'ils ne sont pas tous aussi bons, parce que sur 10 épisodes on se répète forcément, parce qu'on a d'autres jeux à courir que les sempiternels affrontements Terry / Ryo... Et puis, j'ai remis le nez dedans et ça m'a gobé la tête jusqu'au genoux: j'ai rejoint les rangs de tous ces débiles qui ont les 10 sur leur étagère.

On se fait plaisir avec de sacrées conneries, des fois, oui.

Pourtant, j'étais pas dans le faux: le fait est qu'ils ne sont pas tous aussi bons, qu'ils se répètent, et qu'il y a d'autres priorités que d'acheter (ou simplement "jouer à") un KoF de plus. Si vous en êtes à ces pensées raisonnables, vous vous demandez peut-être auxquels vous devriez consacrer votre temps et/ou votre argent; c'est l'objet de ce post, et ce ne sera pas la question la plus simple à résoudre. Demandez donc à des fans de la série quels sont leurs épisodes préférés: vous aurez une réponse différente à chaque fois!

Et quand les avis divergent, c'est même énorme.

La première raison, c'est la part importante qui est liée au vécu. En France, KoF '94, '95 et '96 sont généralement les épisodes qui feront le plus vibrer la fibre nostalgique, car ce sont ceux qui ont marqué le plus de monde, via l'arcade ou les sorties domestiques, et en raison de la popularité du genre à cette période. Et encore, parmi cette vieille garde des fans historiques de la saga, il y a souvent une division entre ceux qui ont connu les deux premiers et ont été déçu des choix opérés sur '96, et ceux qui ont connu la série avec celui-ci et trouvent les précédents archaïques. Mais il y a aussi des joueurs plus jeunes qui eux ont pris le train en route sur la génération PS2, souvent avec les portages de KoF '02 ou '03.



Au-delà de la nostalgie (qui compte évidemment pour beaucoup dans le rétro), il y a bien sûr les appréciations très diverses d'éléments aussi centraux que les graphismes, les musiques et les personnages. Juste pour dire: on trouve des fans de Ash Crimson, tout comme on trouve des mecs qui kiffent la dance music de KoF '01 - c'est une réalité que je n'invente même pas pour les besoins de l'article.



Le gameplay non plus ne fait pas l'unanimité. Entre les partisans des systèmes plus élaborés, complexes, parfois carrément furieux des derniers épisodes, et ceux de la rigueur ou de la simplicité des premiers, on trouve naturellement les adeptes du classicisme et du compromis atteint avec les volets '97 et '98... Certains seront attentifs à l'équilibre du jeu, et à ce qu'il autorise ou non en termes d'enchaînements - ce qui, pour être honnête, risque de leur faire écarter pas mal d'épisodes... D'autres s'en ficheront complètement, parfois parce qu'ils ne jouent que solo - auquel cas ils seront plus intéressés de savoir si l'IA est praticable et si le boss final claque sa reum.


En 94-95, il valait mieux "poker" que balancer des spéciaux dans la tronche de l'IA (impitoyable).

Il arrive aussi que de grandes satisfactions ou déceptions aillent se loger dans des détails tels que le comportement, le costume, la move list, ou la façon d'exécuter tel ou tel coup d'un de ses personnages fétiches. Chaque jeu concentre une foultitude de détails qui, mis bout à bout, sont susceptibles de correspondre, sur des riens, au point d'équilibre parfait pour l'un, et à un assemblage désagréable pour l'autre.

Evoquer de vieux titres, suivre la carrière de certains persos, tout en renouvelant l'offre... Robert pourrait vous en parler.

Ajoutons à cette nébuleuse cet espèce de tout difficilement définissable qu'on appelle "l'ambiance" ou "l'atmosphère", effectivement très variable d'un titre à l'autre, et qui dépend d'une somme de petits détails qui s'ajoutent à ce qui précède, et englobe introduction, scénario développé, cinématiques, boss final, menus, ou même voix de l'annonceur...

Le premier face à face contre Rugal: mythique!

Et enfin, pour parachever le tout, il est évident que tout le monde ne valorise pas à égalité chacun de tous ces aspects! Il y en a qui scrutent les détails liés à la technique graphique ou de programmation, d'autres pour qui les musiques sont une question de premier plan; certains qui frissonnent pour l'histoire et sa mise en scène... Les purs gamers, les esthètes, les collectionneurs, les nostalgiques - et bien sûr la majorité qui sera un mélange à plus ou moins haute dose de tous ces profils. Bref, on ne s'en sort pas!

KoF'03, bien agréable en solo décontracté, mais ni le plus rigoureux ni le plus consensuel esthétiquement.

Internet à la rescousse!

Reste la solution de se tourner vers les critiques rétro (car les critiques d'époque, à moins de vouloir vous faire un trip historique, n'auront que l'attrait de la curiosité). J'en ai sélectionné plusieurs, d'ordres divers:
- les notations de Neo Geo Spirit et Neo Geo Kult (les deux principales références francophones)
- la note moyenne des usagers de GameFAQs (où s'agrègent toutes sortes d'avis plus ou moins valables mais qui a l'avantage du nombre - un genre de "vote du public")
- le nombre d'heures que le jeu a été joué sur Fightcade à un instant T (le vote des joueurs, en quelque sorte)
- les réponses au sondage "Quel est le meilleur King of Fighters sur Neo Geo?" posé sur le forum Neo Geo System (un point de vue majoritairement de collectionneur français)

KoF'02 fait tout simplement péter le compteur d'heures sur Fightcade!


On peut s'amuser à faire des calculs savants pour faire une sorte de moyenne métacritique; on n'a pas besoin de ça cependant pour voir que les écarts significatifs se font entre

KoF '98 - plébiscité
KoF '94, '01 et '03 - les moins appréciés
Tous les autres - dans un mouchoir

Ca permet au moins de se faire une idée de l'opinion majoritaire - qui ne sera pas nécessairement la vôtre. Surtout, il faut garder en tête que tous ces indicateurs sont relatifs; j'entends par là, qu'aucun ne donne la valeur absolue de ces jeux pris individuellement, mais que tous sont évalués en concurrence avec les autres, et en particulier celui qui est réputé le meilleur d'entre eux: King of Fighters '98.

Aussi, mieux vaut-il regarder ces scores séparément, et constater que:
- KoF'02, KoF'98, mais aussi KoF'97 et '95 sont les plus joués sur Fightcade. Ce qui est une gage de popularité et aussi d'aptitude à la compétition. Et ce bien que '97 soit notoirement truffé de bugs et autres fantaisies abusives - il existe d'une part des "règles maisons" pour le jouer en compétition, et d'autre part des mecs suffisamment fanas pour le jouer tel quel dans une sorte de concours d'exploitation de craquage. Notons aussi que ces 3 épisodes les plus joués sont ceux dont le gameplay a été validé par les années comme la formule "classique" du 3 Vs 3, sans striker, et avec une jauge sur plusieurs niveaux.
- Le sondage NGS montre que tous les épisodes ont leurs fans, souvent sur des critères nostalgiques.
- Les notations diverses n'en catégorisent aucun en tant que "mauvais jeu".

3vs3 classique et synthèse entre les deux périodes, 2002 a bien quelque chose du KoF ultime. Ou juste d'un ultime KoF?

Et je crois qu'il faut bien garder ce dernier point en tête, voire le souligner de deux traits. Parce qu'il y a la concurrence entre épisodes évoquée plus haut, et parce que les avis des fans sont souvent passionnés et excessifs dans leurs critiques positives comme négatives. Mais dans l'absolu, King of Fighters, quel que soit l'épisode dont on parle, et son niveau d'exigence, c'est -à défaut d'être de la baston irréprochable- de la très bonne baston.

Tout ça pour dire...

Enfin voilà, je viens de consacrer tout ce développement au final assez long à vous dire que... Il n'y a aucune évidence quant aux épisodes que vous devriez choisir - sauf une: King of Fighters '98! Qu'on le considère ou pas comme "le meilleur" ou "son préféré", c'est le mètre étalon de la série, qui concilie à la fois les styles graphiques et musicaux, le gameplay et les personnages considérés rétrospectivement comme "classiques", et le plus haut niveau de qualité de production. En cela, c'est un épisode qu'il est indispensable d'au moins connaître, quitte à ce que ce ne soit que pour mieux définir ses préférences pour d'autres.

Et ça, je pense que pour maintenant, j'essaierai de le faire dans le billet suivant!

Ce dossier non plus never ends...


lundi 22 juin 2020

The King of Fighters: KoF '98 Vs The World

Le billet précédent se concluait sur ce que beaucoup savent déjà, à savoir qu'il y a un consensus pour dire que King of Fighters '98 est l'épisode indispensable de la série.
Partant de là, je voudrais donc poursuivre sur ce qu'il va rester aux autres pour exister et peut-être vous séduire - car je crois que c'est surtout en ces termes-là qu'il faut se poser la question: plutôt que de chercher "mieux", il vaut mieux chercher ce qui va offrir la diversité la plus agréable pour chacun.


KoF'98 étant un best of des 4 années qui ont précédé, il paraît logique de commencer à chercher la différence du côté des épisodes qui lui ont fait suite - et qui ont, de surcroît, installé de nombreux changements.

Quoi de mémorable après?

Des trois épisodes avec strikers ('99, 2000 et 2001), le plus proche de la formule classique est (assez logiquement) KoF '99. D'un point de vue graphique ou sonore, on n'est pas dépaysé - on est même régalé d'une avalanche d'artworks, animations, détails et nouvelles musiques franchement réussis. En mode un joueur, on a droit à un scénario bidon mais bien mis en scène, qui suit les combats jusqu'à la base secrète d'un nouveau méchant qui tient tout à fait honorablement son rôle. Personnellement, c'est un épisode que j'aime beaucoup, et dont je ne dirais pas que KoF 2000, qui en est pourtant une évolution logique, le rend dispensable. Ce dernier a cependant pour lui pas mal d'atouts à faire valoir: de nouveaux personnages et une pelletée de strikers issus des franchises SNK, qui ressemblent à bien des égards aux adieux de l'éditeur historique.



KoF 2001 et 2003, eux, sont au premier rang des épisodes qui divisent, et certains ne mâchent pas leur mots quand il s'agit de parler des décors et musiques de 2001, ou des bruitages, moteur de jeu et nouveaux héros de 2003. L'un comme l'autre ont pourtant un certain charme dans leurs genres respectifs. KoF 2001, en plus d'une nouvelle gestion de l'équipe et des jauges, propose des incarnations assez inédites de certains personnages (par exemple les Ikari Warriors qui se jouent avec quart de tours et mouvement de dragon punches, ou Robert qui récupère ses meilleurs coups, faisables selon une exécution classique), comme si les développeurs avaient voulu mettre en piste des versions boostées de chacun des personnages. Ca ne sert peut-être pas l'équilibre du jeu, mais ça offre son lot de satisfactions.

Dans 2001, on peut répartir ses 4 persos entre joueurs et strikers. Encore un truc post-'98 sympa mais sans plus.

KoF 2003, de son côté, a pour lui des graphismes rénovés, colorés et attrayants, un casting inédit, et des affrontements assez frénétiques du fait du système de changement de personnage à la volée. On peut positiver et considérer que ses contrôles ont beau être déconcertants (notamment au niveau de la saisie et de l'enchaînement des coups), ils ont le mérite de bousculer les habitudes - mais je n'irais franchement pas jusqu'à en faire une raison pour recommander le jeu!



La question de la comparaison de KoF '98 avec KoF 2002 est intéressante. Disons-le: techniquement, et esthétiquement, il n'y a pas photo. Mais ceux qui jouent de manière compétitive trouveront peut-être leur compte dans sa nouvelle version du max mode qui autorise des enchaînements assez cinglés (bien plus cinglés que je ne peux gérer, personnellement). Le commun des joueurs, lui, appréciera surtout le casting unique qui réunit les figures les plus populaires de la période Orochi et de la période NESTS... A l'exception notable de King, présente depuis '94, et qui dans cet épisode a cédé sa place dans l'équipe des meufs à May Lee... Le jeu ayant été développé pour (et non par, comme on l'entend souvent) Eolith, je suppose que la petite héroïne Coréenne, introduite l'année d'avant, lui a grillé la priorité parce que l'éditeur voulait garder sa mascotte (par ailleurs assez odieusement abusée). A mon avis, hormis un attrait pour ce crossover entre les deux arcs majeurs de la saga et une passion pour les cancels sauvages, on risque de trouver cet épisode plus redondant que complémentaire.

Le casting des deux Dream Matches / épisodes Best Of.


Que reste-t-il aux précédents?

S'il y a un épisode susceptible d'être vampirisé par KoF '98, c'est celui qui le précède immédiatement. Système de combat quasi identique, mais en moins abouti, plus bugué et ouvert aux abus, casting ne proposant aucune exclusivité... On pointe souvent aussi du doigt l'aspect audio de KoF'97: pour l'essentiel, ses combats sont agrémentés d'ambiances sonores plutôt que de musiques. Quelques pistes, classiques et nouvelles (dont certaines mémorables, elles aussi!), subsistent pour accompagner certains personnages... Mais on les retrouve dans '98.




Malgré cela, KoF'97 conserve de nombreux supporters pour qui cette spécificité sonore, pourtant plus souvent décriée que saluée, constitue un atout supplémentaire dans la mise en scène d'une histoire qui est développée comme dans aucun autre épisode, et qui propose de nombreux dénouements différents. C'est donc un épisode relativement clivant dans l'opinion des joueurs; mais quoi qu'il en soit, en tant que conclusion du principal arc scénaristique de la saga, il constitue une référence majeure de "la culture KoF".

Les Teams Yashiro et Special de '97 en on fait un épisode très populaire... Mais pas nécessairement chez nous.

KoF'96 est lui aussi est connu pour son gameplay pété; et si sa BO, elle, est exceptionnelle et fait  plutôt l'unanimité, on en retrouve quand même là encore plusieurs pistes dans '98 - avec une qualité d'échantillonnage nettement supérieure! Ca n'en demeure pas moins un épisode très apprécié, fidèle dans l'esprit et l'esthétique à la recette initiale malgré les nombreuses évolutions qu'il met sur la table, et sa boss team inédite continue de faire parler les fans de SNK de la première heure.



Quant aux épisodes '94 et '95... L'un comme l'autre sont des jeux complètement légendaires, et des assemblages (graphiques, sonores, ludiques) extraordinaires - mais... Leurs sprites sont déjà considérés comme vieillots par certains en comparaison avec ceux des épisodes suivants, et leur gameplay plus rigide (quoi que pas moins précis!) les démarquent également du reste de la série. Simples particularités, spécificités intéressantes, ou défauts, chacun voit ça différemment; il n'en demeure pas moins que cette recette originale n'est pas celle qui s'est imposée avec le temps.





Le trait commun à tous ces épisodes précédant KoF'98, c'est la part de subjectivité encore plus importante pour les apprécier. Ce sont des épisodes de construction, d'élaboration d'une formule, d'une histoire et de personnages; techniquement en retrait, mais esthétiquement riches ; ludiquement imparfaits, mais plus fermement ancrés dans la formule classique de la baston des 90's, et donc plus susceptible de générer la nostalgie, qu'on les ait connus ou non à l'époque. Ce sont des épisodes qui sont clairement plus des choix de coeur, de collection ou de curiosité videoludique que guidés par une quête de performance technique ou d'excellence ludique - même s'ils sont tout sauf honteux de ces points de vue, et qu'au final pas mal des trompe-la-routine post '98 (les strikers, modes counter/armor, ou personnages plus ou moins exotiques) n'auront pas été validé par le temps.



Oké, mais alors, au final?

Au final, ce serait une arnaque que de donner une réponse définitive - mais ça en serait une aussi que de ne pas en donner du tout au terme de tout ce bla-bla! Si j'ai fini par craquer, tous les acheter et tous les jouer, ce n'est pas juste par délire accumulateur, mais bien parce qu'ils ont tous quelque chose pour eux que j'espère avoir réussi à faire valoir au fil de ces lignes. 
Mon avis, qui est celui d'un collectionneur autant que d'un joueur, rejoint celui qui est assez largement exprimé en France en tout cas, à savoir que, paradoxalement (?), les épisodes d'avant '98 restent ceux à connaître prioritairement. Les productions du SNK historique (de 94 à 2000) sont effectivement un cran au-dessus des suivantes; mais au-delà de questions de savoir faire et d'essoufflement, je crois que la naissance de la série a aussi eu lieu au meilleur moment pour en faire prospérer le concept, et que cette période est également celle où la nostalgie fonctionne à plein.
Aussi, si je devais refaire mon voyage à travers la série, je le reprendrai en m'intéressant aux épisodes de '94 à 2000 - ce qui fait encore 7 épisodes, me direz-vous. S'il me fallait affiner cette sélection, je retrancherais 2000 (par cohérence chronologique) et/ou '97 (pour des raisons ludiques) - puis en dernier recours '99 (un cru extra, malgré la rupture avec la période Orochi). Les premiers volets sont pour moi ceux qui incarnent le mieux la série et pourquoi elle m'a fait rêver, ce qui n'est jamais que logique; c'est ce que je valorise dans cette sélection.

La Tier List des KoFs selon mes goûts personnels


Un joueur pur aura sans doute envie de goûter à la rugosité de '95, à la folie de 2000, ou aux possibilités de 2002.
L'esthète amateur de beaux pixels aura lui sans doute dans le collimateur '99, 2000 et 2003.
Celui qui cherche la variété des expériences et la sortie des sentiers battus appréciera le retour en '94, l'immersion dans le tournoi de '97, la dose de 2001 ou le chamboulement de 2003.
J'espère en tout cas qu'au terme de cette lecture, ceux qui ne connaissent pas bien King of Fighters auront les idées un peu plus claires, et peut-être l'envie de redonner sa chance à un épisode jusque-là négligé; quant aux vétérans qui souhaitent y aller de leur expérience et de leur propre préférence, la section commentaires attend leur contribution!

Depuis 1994, Dream Match Never Ends!


jeudi 4 juin 2020

Tournoi de King of Fighters '94 sur Fightcade

Puisque je suis en train de faire un dossier sur King of Fighters, j'ai trouvé que le compte-rendu d'un tournoi de KoF'94 sur Fightcade offrirait une vue par le petit bout de la lorgnette intéressante à y intégrer.

La Chine a déclaré forfait au dernier moment, ça ne s'invente pas.

KoF'94, c'est un de mes épisodes préférés, mais je n'y avais que rarement joué à deux, et c'était surtout il y a longtemps, et à la mollassonne. Le fait est que cette petite compétition avec les copains du Beau Forum Neo-Geo System m'a permis d'y jouer comme je ne l'avais jamais fait, et que ça a été un plaisir vraiment appréciable de se mettre sur la gueule avec d'autres amateurs de gnons, et de ce jeu-là en particulier. Même si tout le monde n'était pas aussi à fond pour la gagne que moi, il n'y avait que des joueurs qui aimaient la bagarre et savaient ce qu'ils faisaient - que demander de plus sinon une ambiance conviviale et avinée? Rien, et ça tombe bien parce que ça aussi il y avait.

Organisation & équilibrage

Une première chose à rappeler pour présenter l'organisation de ce tournoi, c'est que majoritairement, on aura beau dire, les KoF sont des jeux pas mal pétés. Et ce premier volet n'est pas le moins épargné par la règle. 
Le cast est assez déséquilibré, avec des personnages vraiment brutaux (Heidern, Terry, Takuma...) et des bugs qui entre les mains de gros bills peu scrupuleux sont générateurs d'infinis qui tuent le jeu. Il n'est donc pas rare qu'en tournoi, une ou plusieurs règles viennent aménager tout cela.
Par exemple, interdire les infinis - ce qu'on a fait. Facile, il suffit de lister ce qui est interdit.
Après, on peut avoir envie de faire en sorte que toutes les équipes ne soient pas la même collection des meilleurs persos du cast à une ou deux variantes près. Avec KoF'94, ça va à moitié, puisqu'il n'y a pas de Team Edit, les équipes sont fixes. Je dis "à moitié' parce que certains attelages ne comportent que des persos super balèzes (la team Art of Fighting, par exemple). Pour ce tournoi, on a eu la chance d'être 8 inscrits; on a choisi de se répartir les 8 équipes sur le mode "passe à ton voisin", ce qui a créé un genre d'équilibrage: chacun a choisi de filer une équipe (supposée) plus ou moins forte à un autre joueur (supposé) plus ou moins fort.

Qu'est-ce qui au juste fait qu'un personnage sera jugé "Top Tier" à KoF'94? Principalement, il aura un ou plusieurs des traits suivants:
- bouffe-jauge: il dispose d'un ou plusieurs combos abominables (ex: Takuma)
- couteau suisse: il est bon (voire excellent) à tout faire (ex: Ryo/Robert)
- sensei: il a des hitboxes et des priorités qui lui permettent de prendre l'avantage sur, ou contrer la majorité des attaques (ex: Terry/Heidern)
- cracké: un ou plusieurs de ses coups spéciaux ou son Desperation Move est franchement abusif.


La Tier List communément admise, dans ces conditions où les infinis sont interdits, est la suivante:

A: Brazil (Ikari), Mexico (AoF), USA (sports)
B: Italy (Garou), England (meufs), Korea (Kim)
C: China (Athena)

Ils sont pas beaux? ... Non, ils sont pas beaux.

USA FTW!

Bonne pioche, j'ai écopé des USA, qui était une des deux équipes qu'il m'aurait amusé de jouer parce que je ne les connaissais pas trop - et en plus, elle est top tier!
Maintenant, je dois bien avouer que je ne savais pas trop pourquoi elle était supposée être si forte. Les trois personnages sont de grands gusses patauds qui n'ont rien du shotoclone et sont à la peine contre les zoneurs/jeteurs de fireballs et les sauteurs/crossupers tous azimuts; pas franchement des profils à la prise en main immédiate, je dirais.

Et puis j'ai commencé à pratiquer, me documenter, et me faire tuyauter par mon copain Shintok qui maîtrisait nettement mieux le jeu que moi - et c'est je pense assez édifiant. Permettez donc que je vous présente cette Team USA.

Lucky: un personnage pas des plus spectaculaires, le basketteur black. Je trouve qu'il vaut surtout par sa palette de normaux quasiment tous utiles, et dont certains offrent un gros avantage de portée. Ses spéciaux ne sont pas à proprement parler "mauvais", simplement ils sont tous à employer avec modération car pas forcément simples à caser, et faciles à contrer s'ils sont anticipés. Son DM (un sous power geyser) est moyen. En somme, un personnage pas mauvais du tout, que je préfère jouer simplement et sobrement à défaut de savoir en tirer le meilleur.

Heavy D.: le boxeur latino est pas follichon dans les airs, mais il a lui aussi quelques outils assez simples pour se débrouiller. La moitié de ses normaux est nase, la moitié de ses spéciaux est nase, son desperation move est nul à chier - mais ça lui laisse quelques outils suffisants pour bien casser les pieds: des light punches tip-top, des pokes qui vont bien, et de quoi occasionner du chip damage et de la perte de temps pour l'adversaire.

Brian Battler: l'essentiel de la force de l'équipe - Brian, c'est super-connard. Le plus lourd à manoeuvrer des trois, et qui a les normaux les moins intéressants... Ses spéciaux? Une charge bonne à rien (déclenchement lent, récupération longue), une torpille qui ne sert que dans le cadre d'un combo ou d'un coup de chance et... Une toupie volante ultra-prioritaire qui a autant de chance de faire du chip damage en atterrissant devant l'adversaire que du bon dégât ouvrant la porte à combo en passant derrière et en faisant du crossup imparable. Le genre de cochonnerie qui cause des cauchemars à tous les persos qui n'ont pas un dragon punch, ou à la limite un uppercut timé au poil associé à une bonne dose de cul. Dernier détail, la toupie peut aussi être déclenchée pendant un bond avant ou arrière, troquant ainsi sa trajectoire de volant de badminton pour celle du boulet de canon. Pour finir, le gars Brian dispose d'un desperation move infernal, dont le seul inconvénient est qu'on est tellement tenté d'en abuser qu'il en devient facile à anticiper.


La toupie infernale! Elle a donné le tournis à plus d'un!

En comparaison à d'autres KoFs ultérieurs, la part de tactique dans l'ordre des personnages est dans '94 assez limitée. Ici, pas d'affinités entre gugusses, pas de jauge à constituer et transmettre, pas de rôles de "anchor", "point", "battery" ou autre; il n'y a qu'une barre de POW à gonfler en la chargeant ou en ramassant des pains, et elle se vide en fin de round. Ma réflexion est donc restée assez basique sur le sujet, et j'ai quasi systématiquement joué mon équipe dans cet ordre:
1/ Brian. Le plus fort, le plus susceptible de gagner le premier match et donc de ramasser de la vie gratos, et de resservir son DM ignoble à un 2e adversaire.
2/ Heavy D. Avec son style assez peu flamboyant, et ses qualités en contre et en gratte, je l'ai trouvé bien à sa place en 2e: soit pour finir un adversaire amoché, soit pour jouer la montre contre lui.
3/ Lucky. Tout aussi capable que le précédent dans le jeu dégueulasse grâce à ses pokes, il est aussi plus polyvalent et plus susceptible de se débrouiller contre une tortue ou un zoneur.

Autrement dit, j'ai capitalisé à donf sur Brian, espérant faire autant de dégât que possible avec chez l'équipe adverse pour n'avoir qu'à finir le job avec les deux autres. Pas glorieux, non!

Résultat

Cette brillante stratégie m'a fait finir 2e - ce qui était précisément ce à quoi je m'attendais au vu de l'assiduité de chacun aux entraînements en ligne. Le gars Shintok (qui avait écopé de la Meuf Team et a fini premier) était nettement meilleur que moi, et connaissait mes singeries par coeur; il a complètement survolé le tournoi.
J'en dirais pas tant pour moi, qui me suis fait latter en phase de poule par le joueur de la Japan Team qui avait le plan et les outils (simples) pour me mettre à l'amende. C'est la limite quand on n'a mis qu'un atout dans sa manche.


"Meuh, meuh!" C'est de l'américain: ça veut dire qu'on est con, mais qu'on a fait 2e.

Plus généralement, en vrac, et de façon non exhaustive, il ressort de cette petite compét que:
- on a vite fait de se faire plier de façon hyper brutale; un combo à trois pain qui stun suivi de la fessée, avec le Max mode par dessus, et on se fait dégager un perso comme pour rire...
- les dragon punches niquent tout, et pèsent d'autant plus lourd qu'ils permettent aux personnages qui en ont de s'éviter bien du malheur (comme la toupie de Brian) là où les autres vont galérer.
- si on veut rigoler, il vaut mieux encadrer un peu la sélection des équipes (sinon on se retrouve avec un tournoi de Teams AoF)
- le jeu récompense malgré tout assez lourdement l'expérience. Il est très improbable pour un noob de gagner contre un habitué du jeu sur un malentendu, quelle que soit la distribution des équipes. J'en dirais pas autant de tous les jeux de baston!
- l'équilibrage a beau être bancale, le moteur de jeu est lui super précis (là encore, on l'apprécie mieux quand on a goûté à ne serait-ce que du semi-foireux) et reste toujours aussi agréable à jouer après toutes ces années.
- Premier volet ou pas, Team Edit ou pas, grobillisme ou pas, on s'est franchement bien marrés!