vendredi 24 juillet 2020

SNK vs Capcom - SVC Chaos

SVC Chaos - SNK vs Capcom (SNK Playmore)
Test de SVC Chaos - SNK vs Capcom sur Neo Geo (SNK Playmore)
Sortie originale: Neo Geo MVS (2003)
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Le jeu qui divise dès la jaquette!

SVC Chaos, je ne sais pas si on peut dire qu'il a marqué l'histoire de la Neo Geo, mais il a forcément un peu marqué celle de SNK. Car après la faillite et deux années d'errance, quand la firme était renée (pas à l'identique, c'est sûr) sous le label SNK-Playmore, c'est ce titre qu'elle avait choisi pour sa remise en orbite.
Et c'est un peu normal, vu le rêve que ça vendait! L'accord pour ce crossover entre SNK et Capcom  avait été conclu plusieurs années avant; il avait été annoncé, longtemps fantasmé, Capcom en avait fait son interprétation deux fois déjà sur Naomi, avec des portages domestiques... Mais SNK, eux, avaient tout juste pu rendre leur copie sur Neo Geo Pocket, avant de sombrer au tournant de l'an 2000. Alors cette sortie en 2003, pour les fans de la marque, c'était l'exultation! Certains de ceux qui possédaient encore une AES à l'époque en auraient limite encore une larmichette et des trémolos dans la voix rien qu'à évoquer le plaisir de jouer / péter la gueule à Ryu sur leur console chérie, la fameuse Rolls... de la décennie précédente...
Car pour ce retour, SNK-Playmore a fait le choix de développer le jeu sur le hardware Neo Geo, afin d'arroser, avec un minimum de travail d'adaptation, les salles d'arcade (l'increvable MVS étant encore largement implanté) et les consoles de salon (PS2, Xbox... et AES). Les critiques d'époque n'avaient pas été très tendres... On lui a reproché des choix de casting discutables... Mais c'est surtout pour son aspect technique et ses mécaniques de jeu, taxées d'être mal finies et archaïques, qu'il s'est fait démonter. Il faut bien dire, histoire de rappeler un petit peu, que la même année (2003, donc), sur PS2, on pouvait jouer à Guilty Gear X2, par exemple.
Mais le temps a fait son oeuvre... Et dans une ludothèque rétro, SVC Chaos est désormais un jeu de baston Neo Geo sur la même étagère que les autres. Plus que réhabilité, je l'ai même vu cité dans des Top 10 de youteubers. Mieux que ça, je vais vous dire, j'ai carrément rencontré l'homme pour qui c'est Le Meilleur Versus de Tous les Temps et de Tout l'Univers...
Alors d'accord, tout cela sent un petit peu soit l'abus de langage, soit celui du mélange solvants/alcool/drogues dures/backrooms anversoises... Mais malgré mon peu d'appétit pour les titres tardifs de la Neo Geo, j'étais quand même un peu curieux de voir où il se situait, désormais, ce fameux SVC Chaos: entre la daube infâme et le chef d'oeuvre, il y avait de la place!

A ma gauche SNK, à ma droite Capcom

Elle se trouve bien là, l'accroche: dans la confrontation entre deux des plus prestigieuses écuries de la baston.

Matez-moi ce casting! (les deux colonnes centrales ne sont visibles que sur les hacks)

Côté SNK, on n'est pas surpris: les développeurs sont allés piocher dans les sprites de King of Fighters. La franchise regroupant déjà ses propres stars, plus celles de Fatal Fury et de Art of Fighting, c'était une facilité évidente qui fournissait déjà la quasi-totalité du cast SNK. Le défi consistait à harmoniser le reste de la distribution avec cette base. On retrouve les incontournables des trois séries (Kyo, Iori, Terry, Ryo, Geese...), plus trois personnages de Samurai Spirits et quelques surprises (une Athena selon son design original, et un Martien de Metal Slug). Franchement, même s'il est inévitable que chacun déplore certains choix à la marge, je trouve que cette partie de la distribution, qui concilie l'inévitable et l'original, est vraiment solide.

Leopold Goenitz, un de ces persos qu'on dira "trop stylé" (i.e. une sacrée putasserie)

Côté Capcom, ça se défend aussi, mais je ne peux pas m'empêcher de me dire que pour cette occasion unique, il y a de l'absence qui fait un peu plus mal. Qu'il y ait un max de personnages issus de Street Fighter II, c'est un choix qui me convient parfaitement - le match Capcom/SNK, c'est sur cette génération-là que je l'avais rêvé et que je l'attendais. Qu'il y ait Dan de Street Fighter Zero, vu l'histoire du personnage, c'est bien vu. La gargouille de Ghosts'n' Goblins (Red Arremer), cool aussi. Demitri pour représenter Darkstalkers, la classe. Hugo de Final Fight... Mais pourquoi pas, il fallait un perso de Final Fight... Mais que ce soit lui le seul et unique personnage qui en soit issu, et que Haggar, Guy ou Cody n'apparaissent nulle part, je trouve ça d'une tristesse à pleurer... Et c'est pas la sorço-pouf de Red Earth ou cette connerie de Megaman Zero qui me consoleront!

Les sprites de Street Fighter II sont aussi beaux que fidèles aux originaux.

Bon, voilà, ça c'était pour mes ouin-ouin personnels, mais globalement faut pas faire la fine bouche: ça reste une distribution qui sur le papier fait rêver, et réserve davantage de bonnes surprises que de mauvaises dans son exécution.

Les sprites tout neufs côtoient les plus anciens, mais ça passe!

K.O technique?

Il faut dire qu'en terme de graphisme, tout ce beau monde a été très bien traité. Là où le côté SNK, recyclé de KoF, date parfois de 1995-1996 (et accuse donc effectivement son âge, si on se remet dans le contexte de sa sortie), les sprites dessinés pour les personnages Capcom sont, eux, je trouve, assez fantastiques. Tracés sur des frames d'animation des jeux sources, et mis en couleur façon King of Fighters, ils accomplissent, malgré leur plus grande épaisseur de muscles, le tour de force de paraître assez fidèles aux deux univers. Une réussite déjà assez admirable en soi, et qui permet donc à ce crossover de plutôt bien fonctionner visuellement parlant. En tout cas, au niveau des personnages!

Les 4 bosses de SFII sont là, et superbement réussis. 

Car malheureusement pour les décors, on ne peut pas en dire autant. Pour moi, c'est comme l'absence de Haggar: incompréhensible. Pourquoi avoir choisi cette ambiance post-apocalyptique qui n'est pas juste neutre, mais sans saveur et complètement déracinée des deux univers? Pourquoi ne pas avoir installé un portail entre les deux dimensions, et fait communiquer des lieux mythiques des deux éditeurs? Le Japon de Samurai Spirits, la Corée de KoF, la Thaïlande de Street Fighter... Même en les faisant passer à la moulinette cataclysmique, il y avait matière à faire du beau - surtout que d'un point de vue strictement technique, ces décors sont bien réalisés!

Sprites superbes, décors de merde.

Dans le même ordre d'idée, pourquoi nous faire écouter cette espèce de soupe technoïde quand toutes les séries concernées ont tant d'airs mythiques qui ne demandaient qu'à faire vibrer le processeur Yamaha de la Neo? Peut-être que ça ne faisait pas partie des accords commerciaux entre les deux éditeurs... En tout cas, quelle qu'en soit la raison, avouez que c'est quand même triste de ne pas pouvoir balancer de la Power Wave sur la musique de la base aérienne de Guile, ou quelque chose de cet ordre-là... Et au final de se sentir limite lésé de tenir entre les mains un crossover officiel qui se refuse à étaler le même niveau de fan service que le premier MUGEN venu. Du coup, il y a intérêt que le gameplay de ce SVC Chaos soit mieux ficelé qu'un soft amateur!

You hadoken ou you hadoken't?

Heureusement, oui, ce n'est pas complètement n'importe quoi, mais... Mais là encore on est quand même un peu dans la bizarrerie! Vu son ascendance, le jeu ressemble tellement à un KoF que ce qui s'en détache passe au début pour des approximation (à cause de hitboxes parfois surprenantes) ou de l'inconfort (dans la prise en compte de la saisie des suites de coups), mais on s'y habitue vite. Dans l'idée, il y a même un genre de simplification que j'ai trouvé intéressant - les matches en single, les dash/backdash sans course, les sauts qui ne se font pas sur 36 hauteurs, ça ressemble à un retour aux débuts du versus fighting, qui se défend, et qui est cohérent avec la forte coloration Street Fighter II du casting, j'aime plutôt bien. L'association de la maboulerie du Max Mode qu'on trouve dans KoF'02 à ce côté archaïque, même, pourquoi pas? C'est "singulier", on va dire, mais pas mauvais en soi.
Sauf qu'il y a d'autres détails de gameplay qui rament complètement en sens inverse, et introduisent une complexification aussi gratuite que bordelogène. Et ils se révèlent très vite: la choppe doit se faire à bout touchant avec A+B ou C+D... Les charges (arrière/avant ou bas/haut) ne marchent pas en partant des diagonales voisines, elles doivent passer par la direction orthogonale... Et alors pour ceux qui se disent qu'en s'investissant un peu, on finit par passer outre ces détails, qu'ils sachent qu'une maîtrise supérieure leur ouvrira grand les portes... du Guard Cancel sauce SVC (qui permet de quitter sa garde pour "s'invincibiliser" brièvement devant le nez de l'adversaire, soit avec B+C, soit avec un dash avant), c'est à dire une nouvelle dimension de bordel, qui permet de contrer une attaque et potentiellement caser un combo, un spécial, voire un super dans la tronche de son agresseur.

Avis aux amateurs de Kim: dans ce jeu-ci, il n'est pas le seul à obéir à ses propres règles!

Et là... Là, le merdier devient exponentiel! Parce que, pour ce qui est des combos, spéciaux et super en particulier, SVC est le royaume de l'exception. Par exemple, chez les dragon punches, il y a ceux qui marchent en Reversal, ceux qui sont invulnérables à donf, ceux qui avancent loin, ceux qui mettent au sol, ceux qui le font à moitié, ceux qui ne le font pas du tout... Chez les grosses boulettes, c'est pareil: il y a celles qui traversent les petites boulettes, celles qui le font à moitié, celles qui ne le font pas du tout. Et chez les Super, à apparence pourtant identique, il y a celles qui ont de l'invulnérabilité, celles qui tapent en haut, celles qui tapent en bas, celles qui tapent en overhead, celles qui sont imparables, et vous connaissez la suite...

Ca envoie de la boulette de toutes les couleurs!

Sous des airs de déjà-vu accessible, c'est donc un assemblage super étrange de fausse simplicité, de déplacements bridés et de foire à l'andouillette, qui, au final, ne ressemble pas trop à grand chose. Là encore, on peut juste se dire "tant pis". Un peu comme pour Haggar, les décors, et les musiques, en fait: "tant pis".

Et au final?

Si vous suivez un peu mes tests de jeu de baston, vous devez le savoir: c'est un genre pour lequel je suis vraiment bon public. SVC, j'y ai assez longuement joué pour préparer un petit tournoi en ligne avec les copains de Neo Geo System, et je ne peux pas dire que je ne me suis pas amusé avec, au contraire. Notamment parce qu'en dépit de l'apparente abondance de shotoclones, son casting offre une belle diversité de profils très agréables à jouer. Remis dans le contexte de sa sortie, cependant, je comprends qu'il ait ramassé autant de tomates: techniquement obsolète, esthétiquement très discutable, ludiquement bancale; en 2003, ce rejeton des deux géants de la baston tenait effectivement plutôt de l'avorton.
Qu'en est-il maintenant, si je le pose dans ma ludothèque rétro, et plus particulièrement dans mon étagère Neo Geo? Hé bien malheureusement je trouve qu'il s'en tire pas spectaculairement mieux. Techniquement, au milieu de titres du milieu des années 90, la comparaison est évidemment plus flatteuse; en revanche, ses décors vides et ses musiques de compile dance du bac à soldes sont toujours aussi désespérantes, et ne véhiculent pour moi aucun charme ni aucune nostalgie. Ca reste un jeu ancré dans les années 2000, pour le pire, mais hélas pas franchement pour le meilleur.
Encore une fois, ça n'est pas pour autant que le jeu n'est pas amusant (il l'est), et si on a envie de l'aimer quand même, on trouvera bien des branches auxquelles se raccrocher et des qualités à vanter - mais fondamentalement, c'est quand même triste de se dire que la seule qui fera à peu près l'unanimité est contenue dans son titre. En dehors de ça, et de ce que ça peut faire briller dans un oeil de collectionneur, je ne vois pas trop de raison de le préférer à un des nombreux SNK vs SNK ou Capcom vs Capcom.

Un jeu qui peut valoir de 0 à 4 étoiles selon votre exigence - j'avoue avoir eu du mal à me décider et opté pour la facilité!



1 commentaire:

  1. Honnêtement ce jeu mérite zéro étoile tellement c'est honteux pour une Neo Geo et pour la licence qu'il exploite c'est encore pire dès qu'on ose regarder les hits qui l'ont précédés ça ne mérite aucunes indulgence vu le prix des jeux AES sûrement le pire jeu de la machine rapport qualité prix

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